
Saül Weissmann vit à Paris, il a soixante-dix ans et est le seul survivant de sa famille des camps de concentration. Après une vie faite de nombreuses relations et quelques mariages, il est sur le point de se remarier (pour la dernière fois) avec une femme juive, Simone, bien plus jeune et riche que lui, sans aucune relation antérieure, et dont le seul objectif dans la vie avait été de trouver un mari, ce qui ne lui a pas été facile, malgré ses efforts acharnés, à cause de son physique peu attrayant. Lorsqu'ils se présentent tous deux à la synagogue pour organiser les détails de la cérémonie, le rabbin, un jeune homme de vingt-quatre ans attaché au respect strict de la loi mosaïque, exige des futurs époux le certificat de mariage juif de leurs parents. La fiancée n'a aucun problème pour fournir le document, mais les papiers de la famille Weissmann ont été irrémédiablement perdus pendant les événements de la déportation. Malgré tous les arguments logiques (et physiques) apportés par M. Weissmann, tels que la circoncision, le numéro tatoué sur son bras du camp de concentration, le fait d'être le seul survivant d'une famille exterminée précisément pour être juive, le rabbin inflexible refuse de considérer ces preuves : sans certificat, le mariage est impossible. De plus, M. Weissmann ne peut même pas être considéré comme membre de la communauté juive. Cet imprévu amène le protagoniste à remettre en question toutes ses certitudes et à sombrer peu à peu dans une profonde crise d'identité, passant de la lutte pour être reconnu comme juif à l'opposé.
À un moment donné du roman, il est question de « l'humour juif », qui imprègne vraiment tout le récit. Exposé sérieusement, l'argument pourrait sembler absurde, mais la volonté comique de l'auteure rend la lecture agréable, intelligente, soutenue par une double ironie : celle du narrateur (qui semble se moquer de lui-même avec une pointe d'amertume condescendante) et celle de l'auteure (qui, en tant que femme, prend une distance nécessairement ironique par rapport à son personnage et à sa masculinité en déclin). Le résultat est un excellent roman (presque) picaresque. Il n'existe pas de traduction en espagnol, à notre connaissance. L'auteure a cependant publié en français Les choses humaines (2019), qui a été adapté au cinéma en 2021.
Le ton général du narrateur (le roman est écrit à la première personne par le protagoniste) est licencieux, mais dans le cadre de ce que nous avons appelé la « double ironie », le personnage se dépeint lui-même à travers son propre témoignage. Il y a quelques détails scabreux, qui relèvent plutôt du genre picaresque ; cependant, l'auteure ne s'étend jamais sur l'obscène.